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Biloba Neztoile

La fenêtre ouverte vers la prairie


Je rentre dans sa chambre, elle est sous oxygène,allongée sur son lit. Elle m'accueille. Je m'accroupis au bord du lit en me présentant. Elle me conseille de prendre une chaise. Je lui demande de ses nouvelles, me dit qu'elle ne se sent pas très bien. Elle commence par s'asseoir sur le lit. Je sens sa respiration qui s'accélère. Puis elle se lève, ce qui enlève le conduit d'oxygène de son nez. Elle s'accroche au lit. L'angoisse la tenaille. J'essaye de lui expliquer qu'il serait mieux qu'elle reste allongée. Son souffle continue d'être rapide. Elle se tient au pied de son lit, je sécurise ses déplacements en lui tendant ma main. Je continue de lui parler, je ne sais plus exactement de quoi. Je me pose intérieurement la question d'appeler le personnel. Je tente une dernière fois de la rassurer pour pouvoir s'allonger prétextant que son oxygène ne peut pas venir jusqu'au bout du lit. Elle me regarde et elle acquiesce. Un soulagement pour moi. Je l'aide à reprendre sa place dans le lit, je lui remets l'oxygène sous le nez tout en continuant à la rassurer. Je m'appuie sur les chants d'oiseaux que j'avais mis en rentrant dans sa chambre. Je focalise son attention sur ce son. Je sens que, outre l'apport à nouveau de l'oxygène, elle est réceptive à ce son. « Ah oui les oiseaux ! ». Je profite de cette fenêtre ouverte qu'elle m'offre pour la transporter dans un autre lieu à grand espace. Je lui parle d'herbes fraîches, d'un champs de coquelicot « oui j'aime ça », d'une rivière qui coule à côté (le bruit d'une machine dans sa chambre ressemblait à de l'eau qui coulait), je la positionne allongée sur cette herbe où le soleil est juste comme il faut. Il fait bon, je lui propose de respirer calmement, « calmement » me chuchote-elle. Je lui laisse des images entrecoupées de silence. Ses yeux sont fermés, sa respiration devient totalement normale. J'ai même l'impression qu'elle pourrait s'endormir. « Je reviendrais te voir, je te laisse avec le chant des oiseaux ». La voyant s'apaiser, je peux me retirer de sa chambre.

L'angoisse submerge le patient quand il y a « du trop » dans ce qui lui arrive. Accueillir cette angoisse et essayer de la transformer, c'est ce qu'elle m'a proposé que j'accompagne. Parfois il faut oser attendre pour laisser faire. Lors de mes transmissions sur le cahier, j'apprends que cette dame venait d'arriver aujourd'hui dans le service palliatif. J'espère que les oiseaux l'accompagneront encore un long moment pour l'accueillir dans la nouvelle étape de sa vie…

mercredi 17 octobre 2018


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